Résumé :
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On semble admettre comme une évidence que le toxicomane fuit la vie. La banalité de cette affirmation ne doit pas nous empêcher, toutefois de nous interroger : de quelle vie est-il ici question ? La vie que le toxicomane veut fuir est celle de tout un chacun, la vôtre, la mienne, c'est-à-dir la vie de ceux qui prétendent ne pas se droguer, ne pas être toxicomane. Il faut alors nous demander comment se caractérise, d'une façon générale, cette vie du commun dans laquelle le toxicomane a été éduqué et dans laquelle nous voulons le réinsérer. Le toxicomane est en quelque sorte la caricature de notre vie. Comme nous, il veut prendre ses désirs pour la réalité. Il cherche cet 'état de bien-être' auquel nous aurions droit (cfr OMS), cet épanouïssement de soi qui serait possible via la consommation d'un quelconque produit : je consomme des objets pour être heureux. Le toxicomane comme nous, cherche aussi à se sécuriser face à la violence de la vie et son caractère imprévisible. Face à cela, nous nous crons un univers d'habitudes où tout est maîtrisé. Le toxicomane, lui, vit dans son corps les limites que nous, nous rejetons de notre existence. Plutôt que de s'en faire le spectateur, il vit en effet, la souffrance et le manque. Il côtoie aussi la mort : et c'est grace à cela qu'il se sent vivre. Il incarne par excellence les limites de la finitude humaine en ne cessant de les défier. Aussi, les campagnes de prévention ne peuvent chercher à mettre les jeunes à l'abri de la souffrance et de la mort sans risquer de les empêcher de 'vivre'. Les agents de prévention se doivent de faire le deuil de leurs illusions et accepter eux-même la vie réelle faite de souffrance, de solitude, de mort.
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