Résumé :
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La publication d'Outsiders d'Howard S. Becker, en 1963, prend place parmi les étapes importantes du développement récent de la sociologie, et plus particulièrement de la sociologie de la déviance.
Outsiders, avec quelques ouvrages contemporains, a d'abord contribué à élargir les limites dans lesquelles s'inscrivaient antérieurement les recherches sur la délinquance. Le terme déviance, qui désigne le domaine de la vie sociale étudié dans Outsiders, possède, dans la sociologie américaine, un sens plus large que celui de délinquance : sont qualifiés de « déviants » les comportements qui transgressent des normes acceptées par tel groupe social ou par telle institution ; cette catégorie inclut donc les actes sanctionnés par le système juridico-policier — par exemple la consommation de marijuana étudiée plus particulièrement dans Outsiders —, mais aussi les maladies mentales ou l'alcoolisme. Becker comprend même dans ce champ d'étude un groupe professionnel comme les musiciens de jazz qui n'est exclu — et ne s'exclut — de la société conventionnelle que par son mode de vie et ses goûts. De fait, la contribution d'Outsiders aux recherches sur la délinquance a justement consisté à faire apparaître des problèmes ignorés des criminologues, qui s'enfermaient dans l'étude d'un univers restreint de cas dont la définition sociale leur semblait aller de soi. Mais l'importance d'Outsiders tient aussi à ce que cet ouvrage, à côté d'Asiles de Goffman, paru deux ans plus tôt, a donné un exemple convaincant des résultats auxquels peut conduire l'étude minutieuse, de type ethnographique, d'un secteur limité de la vie sociale…
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